Témoignages

Je partage cette inquiétude, car je suis professeur des écoles titulaire remplaçant (TR) en Essonne, militant syndical et représentant du personnel au SNUipp-FSU91. Je constate depuis des années l'influence néfaste du numérique à l'école - et à domicile -, générant un nombre croissant d'élèves souffrant de divers troubles (TDAH - troubles de l'attention avec ou sans hyperactivité - ou TEI - troubles explosifs intermittents). Mais aussi, un nombre tout aussi croissant d'enseignants démunis face à ces élèves perturbateurs ou à comportements particuliers, remplir des fiches du RSST (registre de santé et de sécurité au travail dont nous traitons les fiches au syndicat) qui restent sans réponses satisfaisantes venant de l'Education nationale, enseignants qui finissent en arrêt de travail ou par démissionner. Ces conditions dégradées d'enseignements participent à la baisse du niveau généralisé des élèves et au déficit de recrutement d'enseignants.

Enseignante en GS de maternelle et maître formatrice auprès de jeunes collègues, je m'inquiète de voir l'invasion des "simples" téléphones dans les classes à l'école maternelle. Nous sortons sans arrêt nos téléphones de nos poches pour les prendre en photo pour le cahier de Vie ( du pédagogique donc) , pour répondre à une notification what's app d'une de nos collègues qui souhaite échanger un créneau de bibliothèque ( encore du pédagogique) ou pour lancer la musique de rangement sur Deezer ( encore du pédagogique!) et au final...nos élèves vivent avec des adultes qui ont un téléphone greffé dans la main.
J'ai décidé depuis quelques mois de volontairement "reculer" et de ne plus sortir mon téléphone en classe, même sous un prétexte pédagogique.
On voudrait que les ados cessent de "poster" sur Insta et de faire leur story en ligne mais au final...on est arrivé à des aberrations où des élèves de maternelle "posent" devant leur construction en légos...et nous ne prenons pas toujours le recul nécessaire pour "voir" que c'est nous les premiers qui faisons leur stories ...sur leurs cahiers de Vie...alors qu'ils n'ont que 4 ans!
Étant en pleine remise en question et dans une démarche à la fois de recul et une volonté d'ouvrir les conscience de mes stagiaires dans le même temps où j'ouvre la mienne, je suis ravie de soutenir votre mouvement.
Mes filles sont également scolarisées en 5eme et en 3eme et en effet cette tyrannie de la connexion à pronote me pose vraiment problème...donc, merci pour votre initiative!

Les risques du numérique sont clairement montrés dans le livre "la fabrique du crétin digital".
Je suis en guerre permanente pour que mes enfants soient confrontés le moins possible aux écrans (pourtant moi-même informaticien) et cet entrisme à l'école va doucher cette volonté.

Sébastien

Merci de mener cette action, je suis maman d'une enfant scolarisée et prof et je rejoins tout à fait votre lutte. Elle me semble tellement pertinente et à mon échelle, j'ai lutté et lutte contre cette surexposition scolaire donc institutionnalisée !!

Solène

Enseignant de métier, je constate tous les jours que le numérique nuit à la réflexion, plus d'esprit critique ou remise en question dd l'information numérique .

Régis

Numérique sans conscience n'est que ruine de l'homme. Le solutionnisme technologique est une illusion totale. Le capitalisme technologique pulsionnel sous algos qu'évoquait souvent le regretté philosophe Bernard Stiegler à tout envahi et il plus qu'urgent de réagir avant qu'on finisse tous lobotomisés devant les gafam et autres Natu.

Laurent

Je suis directeur de la transformation digitale dans mon entreprise… et clairement je suis perplexe d’apprendre aux enfants à écrire du code dès le collège. Il vaut bien mieux leur apprendre de la logique maths physique, grammaire … et des langues. S’ils ont bien ça ce sera facile pour eux d’ajouter une corde à leur arc le moment venu (car en plus le faire en avance, vu la vitesse d’évolution , ça aura déjà changé d’ici qu’ils en aient besoin!).

Bravo pour cette initiative qui va dans le sens de bon nombre de parents qui n'osent ou ne prennent le temps de dénoncer cette hérésie du numérique à l'école. Informer les dirigeants n'est pas mince affaire !
Rien que sur le plan d'investissement actuel "France 2030", une subvention est prévue pour toute école primaire ou maternelle s'équipant de numérique (TBI, PC portable...) et l'enveloppe est conséquente, plusieurs milliers d'euros sont attribués à chaque commune qui en fait la demande.

Adeline

Enseignant en primaire depuis 25 ans et parents de deux enfants, je partage entièrement votre réflexion et je lutte à l'école pour utiliser avec parcimonie et intelligence les nouvelles ressources numériques.
Ma pensée est la même que la vôtre depuis plus de 10 ans.
Bravo pour votre article

Patrice

Je suis totalement d'accord avec vos réflexions.
Je suis bien désolée de ces politiques qui semblent avant tout permettre toujours plus de croissance pour la vente de matériel numérique, et non un réel soutien des enfants, et des enseignants ! En tant que maman d'une collégienne, en 6ème quand on nous a dit qu'il fallait regarder ProNote tous les jours, enfants et parents, le soir même j'ai dit à ma fille : "pas question que tu prennes l'habitude de te connecter tous les jours à un logiciel, tu utilises ton carnet de texte pour noter tes devoirs, et si un professeur rajoute des devoirs via pronote sans vous le dire et qu'il te fait une remarque, j'irai parler avec lui".
Ma fille m'a raconté la colère d'une de leur professeur, ainsi que des enfants de la classe, lorsqu'on leur avait enlevé le super tableau noir à craie, pour le remplacer par un tableau type "veleda", qu'ils trouvaient tous beaucoup moins bien ! J'ai échangé avec une amie professeur en lycée, qui nous disait qu'elle préférait utiliser les téléphones portables des élèves plutôt que les tablettes qu'ils avaient eu car elles ne sont pas pratiques pour regarder les vidéos qu'elle a à leur montrer. Elle nous disait que des élèves revendent leur tablette.
J'ai discuté avec une collégienne qui aurait besoin d'une tablette pour l'aider à prendre ses notes de cours car elle a des soucis de dyslexie, mais elle n'a toujours pas eu de tablette, et elle n'a pas le droit d'utiliser son téléphone à la place...
Les appareils numériques peuvent certainement être utiles dans quelques situations, mais sûrement pas pour tout le monde et de la façon prévue.
La priorité devrait être d'avoir plus de professeurs pour avoir des classes avec beaucoup moins d'enfants...

Christine

Nous sommes déjà victimes dans notre vie privée d'un Etat qui souhaite renoncer aux tâches administratives.
OK, on peut comprendre la nécessité de faire nous-mêmes certaines démarches. Personnellement je m'exaspère quand je vois que les tâches prennent BEAUCOUP plus de temps que "par le passé", avant cette vague de digitalisation. Mais que le travail nous soit délégué dans d'autres sphères, comme à l'école (ENT, turbo-self, pro-note...) c'est excessif. J'ai déjà un travail à plein temps--ne me demandez pas de faire aussi le travail d'autres personnes (qui sont payés pour faire ce travail, et qui ont, disons le, beaucoup plus de vacances que moi...) ! Ma famille a vécu pleinement cette révolution digitale : 3 enfants dans le secondaire entre 2009 et aujourd'hui. En tant que parents, nous avons vu une volonté de pousser les élèves à passer du temps devant un écran quotidiennement. En tant que parents nous aurions préféré que nos enfants n'aillent pas sur l'ordi en fin de journée, parce que, une fois la tâche Pronote réglée, il y avait YouTube, etc...
Avec chaque année, le phénomène s'est amplifié, parfois avec des exercices à rendre sur une plateforme. Un autre exemple beaucoup trop fréquent : une prof oublie de donner un devoir pendant le cours, mais le poste sur Pronote pendant le week-end. Aucun adulte n'accepterait une telle action de son employeur! Quand on quitte le travail vendredi, on a en tête une heure de retour le lundi, qui ne sera pas modifié le dimanche. C'est Covid qui a réellement poussé le phénomène aux proportions que l'on connaît aujourd'hui. Maman d'un élève de Terminale, je me sens "bombardée" de messages ENT, parfois des messages qui annulent et remplacent... Je préférais de loin le carnet de suivi--et soyons honnêtes : ces messages conservés pendant des années ne sont probablement pas plus écologiques que les messages papiers d'avant. Et je n'ai même pas touché au sujet de l'instruction (car j'interviens aussi comme enseignante au Greta). Evidemment, le digital dans l'enseignement peut être un outil de valeur, mais je vois beaucoup trop d'abus parmi mes élèves, qui auraient besoin d'être sevrés de leur écran. Ils utilisent l'ordi portable en cours d'anglais "pour prendre des notes", mais surtout pour traduire des phrases en anglais, avant de lever le doigt et contribuer au cours. Chaque semaine je dois répéter que, aujourd'hui nous n'aurons pas besoin des ordis, et chaque semaine c'est une vraie bataille ! Peu importe qu'ils préparent un examen d'anglais exclusivement oral... Ils me disent qu'ils ne peuvent rien sans leur ordi. On récolte ce qui a été semé.
Lisa

Professionnelle de la culture scientifique, je sais que la meilleure pédagogie est celle qui passe par l'humain.

Muriel

Professionnellement investi dans les réseaux d'éducation à l'environnement, je suis confronté régulièrement aux travaux démontrant les bienfaits de l'école dehors, dans les parcs, la forêt, la campagne, sur le littoral... L'école sur écran me semble être tout le contraire de cette piste autrement plus prometteuse.

Bonjour
Je suis enseignant en histoire-géographie en collège. Le passage au manuel numérique à la maison pose pleins de problèmes. Certains parents payent en plus un manuel papier pour faciliter les apprentissages. En classe pour faire des économies il y a un livre papier pour deux élèves et le livre scolaire numérique au vidéo projecteur. La fatigue visuelle des écrans concerne aussi les enseignants. A 60 ans j ai évité heureusement pour le moment les tablettes pour les élèves en classe.